À 32 ans, Emma Flint vit enfin un moment qu’elle attendait depuis trois décennies. Pour la première fois de sa vie, elle ressent ce sentiment libérateur d’être véritablement « vue ». Ce déclic survient le jour où elle découvre le mot « abrose*uel ». Un terme qui va bouleverser sa perception d’elle-même.
Trente années de questionnements, de doutes, de culpabilité. Emma a traversé un parcours identitaire chaotique, jonglant entre différentes orientations sans jamais trouver celle qui lui correspondait vraiment. Sa se*ualité lui semblait insaisissable, changeant parfois en l’espace de quelques jours. Tantôt elle se définissait comme lesbienne, tantôt comme bisexuelle. Cette instabilité la rongeait.

Le coming out qu’elle espérait bienveillant tourne au cauchemar. Ses proches l’accueillent avec des remarques cruelles et un scepticisme marqué. Certains remettent carrément en question la légitimité de son identité. Emma se retrouve face à un mur d’incompréhension.
« Je me reprochais de ne pas être stable dans mes attirances », confie-t-elle. Cette jeune femme qui a grandi dans les années 1990 et 2000 n’avait alors accès qu’aux orientations « classiques ». Hétéro, gay ou lesbienne. Le reste était perçu comme « inventé ». Mais cette méconnaissance générale cache une réalité bien plus complexe que ce que la société voulait bien admettre à l’époque.
Cette réalité porte un nom : l’abrose*ualité. Une orientation qui décrit des attirances fluctuantes, changeantes, évoluant rapidement d’une période à l’autre. Un concept encore largement méconnu du grand public.
Le terme circule davantage chez la génération Z sur les réseaux sociaux, particulièrement sur TikTok. Mais il reste invisible ailleurs. Pour Emma, cette invisibilité explique ses années de galère identitaire. Dans les années 1990 et 2000, les codes étaient clairs et limités. On était hétéro, gay ou lesbienne. Point final.
« Tout le reste était perçu comme inventé », se souvient-elle. Cette rigidité sociale l’a enfermée dans un carcan impossible. Sa sexualité lui semblait insaisissable, fluctuant parfois en quelques jours seulement. Un moment lesbienne, l’instant d’après bisexuelle. Une instabilité qui la culpabilisait profondément.
Elle avait l’impression de ne jamais pouvoir « choisir ». Les jugements de son entourage accentuaient cette souffrance. On lui reprochait de passer d’une identité à l’autre sans explication claire. Comme si elle manipulait ses sentiments par caprice.
L’abrosexualité se distingue pourtant nettement de la pansexualité. Cette dernière s’attache aux personnalités indépendamment du genre. L’abrosexualité, elle, met en avant une variation régulière des attirances au fil du temps. Une nuance fondamentale que peu comprennent encore aujourd’hui. Cette méconnaissance va bientôt basculer grâce à une rencontre virtuelle déterminante.
Cette rencontre virtuelle a un nom : Zoe Stoller. Une créatrice et militante LGBTQ+ très suivie aux États-Unis. Sur ses réseaux, elle explique à ses abonnés la spécificité de ce terme encore mystérieux : l’abrose*ualité.
Sa définition est limpide. Contrairement à la pansexualité qui s’attache aux personnalités indépendamment du genre, l’abrose*ualité met en avant une variation régulière des attirances au fil du temps. Une distinction cruciale que personne n’avait jamais expliquée à Emma.
L’impact est immédiat. « C’était révélateur », confie-t-elle. Enfin, un mot qui colle parfaitement à son vécu. Trente années de questionnements trouvent soudain leur explication. Cette fluctuation qu’elle subissait comme une tare devient une réalité légitime.
Le déclic est total. Emma découvre qu’elle n’est pas seule, pas anormale, pas inconstante par faiblesse. Elle est abrosexuelle. Point final. Une étiquette qui correspond parfaitement à ce qu’elle vit depuis des années sans pouvoir la nommer.
Aujourd’hui, elle revendique cette identité avec une assurance nouvelle. Fini les excuses, les justifications permanentes. Elle refuse catégoriquement de céder à ceux qui exigent d’elle une orientation « fixe » ou « définitive ». Sa sexualité fluctue, c’est sa réalité.
Mais cette sérénité personnelle ne suffit pas à faire taire les résistances extérieures. Le combat pour la reconnaissance ne fait que commencer.Ces résistances prennent des visages familiers. Des sourires sceptiques quand elle explique son orientation. Des demandes insistantes de « choisir un camp ». Des regards qui la jaugent comme si elle inventait son identité pour faire l’intéressante.
Beaucoup perçoivent l’abrosexualité comme une simple tendance passagère. Une mode imposée par les réseaux sociaux, rien de plus. Cette méfiance blesse encore parfois, mais Emma a appris à riposter avec fermeté.
« Être abrosexuel n’empêche pas d’aimer sincèrement », martèle-t-elle. Ses relations amoureuses ne sont pas invalidées par la fluctuation de ses attirances. Elle aime d’abord une personne dans sa globalité, avant de se soucier du genre. Une nuance que beaucoup peinent à saisir.
Les exigences de stabilité l’agacent particulièrement. « Certaines personnes prennent plaisir à exiger que je choisisse ma voie afin de ne pas être offensées par mon identité », confie-t-elle avec une pointe d’amertume.
Mais Emma a tranché. À 32 ans, elle préfère se concentrer sur son bonheur personnel plutôt que sur les jugements extérieurs. Fini les justifications permanentes, les excuses embarrassées.
Son message est clair : l’abrose*ualité mérite d’être reconnue comme une orientation légitime. Au même titre que toutes les autres. Pas comme un effet de mode ou une lubie d’adolescent. Une réalité humaine à part entière, qui ne demande qu’à être comprise.